Bonjour Docteur, je viens pour une prescription d’Argaive. J’en ai grand besoin.
Vos constantes sont bonnes, mais je ne prescris pas ce produit. Un
médecin soigne, le désir n’est pas une maladie.
Non, mais il me pourrit la vie. Selon l’OMS, « La santé est un état de complet bien-être physique, mental et social, et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité. ». Je n’ai pas besoin de ma libido, le désir, c’est plus large que ça.
Le désir fait partie de la vie. C’est le piment du couple. Il me semble que vous êtes marié. C’est une des fonctionnalités basiques des mammifères. Pour les autres classes, je ne me prononce pas. Vous êtes marié depuis longtemps, il me semble ; vous en avez parlé avec votre épouse ?
Oui, bien sûr, mais cela ne l’intéresse pas. Mes besoins ne sont pas comblés. C’est juste devenu un sujet de dispute, la seule alternative qui reste serait de la quitter, mais je ne me vois pas quitter mes enfants et reconstruire une vie ailleurs. Et d’ailleurs, il n’y a aucune garantie que ma frustration baissera dans le futur, même lointain. Et j’ai une grande tendresse pour elle.
Le désir est la base de beaucoup de chef-d’œuvre ou a servi de moteur dans la vie à beaucoup d’hommes.
Oui, il a aussi beaucoup servi aux harceleurs.
Je reste persuadé que c’est une mauvaise idée. Qu’est-ce qui dans la vie donne envie de faire quelques choses plutôt que rien ?
Docteur, des produits agissent déjà sur l’humeur, les antidépresseurs jouent aussi sur le plaisir en gérant la dopamine.
Vous connaissez le Ziban ? Qui baissait le plaisir de fumer ? Ou la Ritaline contre l’hyperactivité ? Ils changent l’humeur, mais il est totalement déconseillé de les prendre à long terme.
Oui, le Ziban était accusé de provoquer des suicides par la destruction des envies, et la Ritaline d’être une camisole chimique qui transformait les enfants en robot. Je me suis renseigné, les dernières études ont montré que les problèmes sont plus liés à l’arrêt de la nicotine et à la dépression, qu’aux produits.
Je le sais bien, je voulais souligner que ces traitements nécessitent un gros suivi psychologique.
Vous ne l’avez vraiment jamais prescrit ?
Si, à un “incel” une fois, le genre célibataire subit et très aigri, niveau “administrateur de forum”. Il ne prenait vraiment pas soin de lui, je me disais qu’au mieux il devait être harceleur. Depuis il utilise son énergie dans sa boite de freelance.
Vous voyez ? Toute cette économie d’énergie à chercher une moitié qu’il ne trouvera jamais !
Comment en être sûr ? J’en ai prescrit aussi à un tombeur frénétique. A l’inverse, il alignait les conquêtes, à tel point, que c’était les serveuses qui prévenaient les demoiselles ; il gérait plusieurs histoires en parallèle. Sa vie devenait hyper complexe, alors qu’il aurait aimé s’installer. Je dirais que sa libido est redevenu normal, il ne l’a pas supprimé totalement non plus.
Je sais que ce n’est pas idéal, que comme dans la nature, la sexualité permet d’arrondir les angles relationnels. Mais là, c’est une gêne.
Vous êtes prêt à prendre le risque de délaisser votre femme.